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lundi 3 octobre 2016

LA DÉCLARATION MAUVAIS GENRE DU PAPE FRANÇOIS


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LE PAPE FRANÇOIS, AU RETOUR DES JOURNÉES MONDIALES
DE LA JEUNESSE, À CRACOVIE, LE 31 JUILLET.
PHOTO FILIPPO MONTEFORTE


Dans l'avion qui le ramenait à Rome, le pontife s'est épanché sur la fameuse (et inexistante) «théorie du genre», «sournoisement» promue par les manuels scolaires français.
 Par Catherine Mallaval
LA THÉORIE DU (MAUVAIS) GENRE
Et pim sur le pape, qui n’a rien trouvé de plus intéressant à faire dimanche que de lâcher une très bécasse confidence à une poignée de journalistes dans l’avion qui le ramenait à Rome après trois jours dans le Caucase. Alors voilà, le pape François s’est plu à raconter une anecdote rapportée par un père de famille français, effaré que son fils de 10 ans envisage de devenir une fille. Tellement incroyable que le Pontife s’est mis à accuser les manuels français de propager un «sournois endoctrinement de la théorie du genre», tout en rappelant dans un bel élan de clémence la nécessité d’accueillir avec miséricorde les personnes homosexuelles et transsexuelles.

Najat Vallaud-Belkacem et NKM, sœurs de combat

Telle accusation à l’encontre de nos manuels a bien sûr fait bondir la ministre de l’Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, qui a «regretté» lundi sur France Inter la «parole pour le moins légère et infondée» d’un pape qui, selon elle, «a été lui aussi victime de la campagne de désinformation massive conduite par les intégristes». Elle aussi magnanime en son ministère, Najat Vallaud-Belkacem «conseille au pape, lors de l’un de ses prochains déplacements en France, de venir à la rencontre d’enseignants de l’école française», «de feuilleter lui-même ces manuels scolaires, ces programmes et de m’expliquer en quoi il y aurait une théorie du genre, qui n’existe pas par ailleurs, dans ces livres», a-t-elle ajouté.

La ministre n’est pas seule à être montée au créneau. Et s’est trouvée une sœur de combat en la personne de Nathalie Kosciusko-Morizet, candidate à la primaire de la droite, qui sur Europe 1 a aussi déclaré que le Pontife était «allé un peu vite en besogne». «Les manuels scolaires, je les regarde de près, j’ai deux petits garçons qui ont 11 ans et 7 ans […] et je n’ai jamais rien trouvé qui ressemble à la théorie du genre», a-t-elle assuré.

Neurones embrouillées

Mais pourquoi le pontife s’est-il lancé une déclaration d’un si mauvais genre ? Bizarre en effet quand on sait que le terme même de «théorie du genre» n’est en fait pas… une théorie. Dans la réalité, il n’existe que des Gender Studies – comme on dit aux Etats-Unis –, ou études de genres en français, ou encore études des rapports sociaux du sexe (lesquelles interrogent à travers la sociologie, l’histoire, ou le droit, la manière dont les normes se reproduisent jusqu’au point de paraître naturelles). Et ce avec en préambule, une affirmation : l’identité sexuelle n’est pas déterminée uniquement par le sexe biologique, mais également par la société. Une reformulation du fameux «On ne naît pas femme, on le devient» de Simone de Beauvoir.

En France, ceux qui se plaisent à parler de «théorie du genre» ont été particulièrement actifs lorsqu’il fut tenté en 2013 de mettre en place des «ABCD de l’égalité», concrètement des ateliers visant à lutter contre les stéréotypes dès le plus jeune âge.

De quoi embrouiller les neurones des petits qui ne sauraient plus à l’arrivée s’ils sont une fille, un garçon, ou pourquoi pas, ô terreur de ceux qui brandissent leur fameuse théorie, un ou une homo ? C’est en tout cas le fantasme repoussoir qu’avaient agité des fervents de la Manif pour tous, des proches du nationaliste Alain Soral avec, en fond sonore, toute une brochette d’élus de droite et l’Eglise, qui en a fait son cauchemar.

Catherine Mallaval