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samedi 1 novembre 2014

CHILI: LA RÉFORME DE L'ÉDUCATION EN ZONE DE TURB ULENCES

MANIFESTATION D'OPPOSITION AU PROJET DE LOI DE RÉFORME DE L'ÉDUCATION AU CHILI
« La réforme de l'éducation a connu plusieurs revers au Parlement. Il semble que, finalement, on ne veut pas tant éradiquer le marché de l'éducation qu'en réguler certains aspects », explique à l'AFP Melissa Sepulveda, présidente de la puissante Fédération des étudiants de l'Université du Chili qui appelle à un changement radical du modèle hérité de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990). 

« On est en train d'en finir avec l'éducation de nos enfants et cela affecte directement la classe moyenne et les couches les plus vulnérables du pays », estime pour sa part Erika Muñoz, présidente d'une Fédération de parents d'élèves qui critique les changements. 

L'Eglise catholique, l'opposition de droite, les associations de parents et les démocrates-chrétiens qui font partie de la coalition au pouvoir ont critiqué l'interdiction faite aux collèges de louer leurs locaux, une mesure qui permet à certaines écoles appartenant à des congrégations religieuses de se financer et de continuer à travailler. 

Mais grâce à ces locations, de nombreux directeurs de collèges font aussi des profits conséquents. 

Selon les mesures approuvées par la Chambre des députés, les écoles subventionnées doivent être propriétaires de leurs locaux, ce qui les forcent soit à les acheter pour continuer à fonctionner soit à fermer leurs portes. 


- Tensions dans la coalition - 

Avec des centaines de manifestations, les étudiants chiliens ont mis ces dernières années l'éducation au coeur du débat, exigeant qu'elle soit publique, gratuite et de qualité dans un pays régi par un des systèmes les plus inégalitaires de la planète, où la gratuité de l'université n'existe pas et où de moins en moins d'élèves fréquentent les écoles publiques et gratuites. 

La promesse de réformer le système en profondeur a valu entre autres à Michelle Bachelet d'être réélue avec 62% des voix. 

Mais après huit mois au pouvoir, la présidente socialiste affronte une forte opposition de droite et des tensions au sein même de la coalition au pouvoir où cohabitent socialistes, démocrates-chrétiens et communistes, avec des visions différentes sur la profondeur de la réforme. 

La Démocratie-Chrétienne est pour sa part d'autant plus prudente que plusieurs de ses dirigeants sont propriétaires d'écoles subventionnées. 

« La réforme traverse une période difficile. La tension est grande, car il y a de profonds désaccords sur des questions de fond », indique à l'AFP le politologue Max Colodro, de l'université Adolfo Ibáñez. 

La DC a convoqué un Conseil national extraordinaire pour discuter de l'avenir de la réforme, qui doit maintenant être examinée prochainement par le Sénat, où un débat tendu est anticipé. 

« Le plus probable est qu'in fine le Sénat rejettera certains aspects de la réforme. Nous sommes peut-être au seuil d'une crise politique complexe », prédit Max Colodro. 

Jeudi, le président du parti, Patrick Walker, a affirmé que la DC restait fidèle au gouvernement de Bachelet et a demandé que soient respectées les « différences légitimes » au sein de la coalition. 

Dans ce contexte, des parents d'élèves d'établissements subventionnés qui craignent que ces écoles - environ 5.000 - ne ferment leurs portes ou deviennent des écoles privées, ont organisé une manifestation massive contre la réforme le week-end dernier. 

« La réforme du gouvernement nous met au pied du mur », affirmait samedi Esteban Mora, père de deux enfants qui fréquentent une école subventionnée. 

Pour Michelle Bachelet, ces appréhensions sont dues à une « campagne de terreur » menée contre sa réforme. « Nous ne voulons pas fermer les écoles privées, nous ne voulons pas qu'il y ait seulement des écoles publiques », a-t-elle affirmé lors d'une récente visite en Espagne. 

Après la réforme dans l'enseignement primaire et secondaire, la prochaine étape sera d'instaurer la ágratuité de l'université, promise par Michelle Bachelet dans un délai de six ans.