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mardi 22 avril 2014

PHOTO - SERGIO LARRAÍN, L'EXPO ET LE LIVRE

Sergio Larraín fait partie de cette génération qui a écrit les débuts du photo-journalisme. Enfant de la bourgeoisie chilienne, il découvre petit à petit la photographie à travers l’objectif d’un Leica, qu’il apprend à maîtriser au cours de ses voyages en Amérique du Sud, en Bolivie, au Pérou et au Chili. En voyage en Europe, il a la chance de rencontrer Henry Cartier-Bresson à la fin des années 50, qui l’invite à rejoindre sa coopérative Magnum Photos. Dès lors, Sergio Larraín parcourt le monde pour illustrer l’actualité mondiale.

Il s’installe deux ans à Paris, et part faire des reportages, que ce soit en Iran où il couvre le mariage du shah, ou en Italie où il enquête sur la mafia sicilienne. Très vite, il ressent cependant la nécessité de rompre avec ce milieu, qui consume son besoin d’indépendance et nuit à la qualité de son travail. Déçu également par l’incapacité de la photographie à changer le monde, il s’en retourne donc au Chili où il se plonge dans une quête spirituelle, passant les trente dernières années de sa vie à pratiquer du yoga et à entretenir une riche correspondance, isolé à Tulahuén, dans la région de Coquimbo. C’est là qu’il s'éteint le 7 février 2012.

Une photographie de la marginalité

ALBERTO HURTADO CRUCHAGA ET DES ENFANTS DES RUES 
Sergio Larraín a découvert la photographie à Chiloé. Mais il abandonne assez vite  les pêcheurs pour focaliser son attention sur les enfants vagabonds de Santiago. En saisissant leur quotidien, leurs jeux, leurs habits trop larges et, surtout, leurs expressions d’adultes, le photographe suit ces ‘gavroches’ dans l’univers industrialisé de la ville (on est alors dans le début des années 60). Il en fait même un court-métrage, qui est présenté à l’exposition.

Les images de Sergio Larraín, en noir et blanc, sont le signe d’une photographie spontanée, qui cherche toujours à capter le détail qui fera toute la magie de la photo. Une attitude qui réclame une émancipation totale : « Une bonne image résulte d’un état de grâce. La grâce s’exprime quand elle est libérée des conventions, comme pour un enfant qui découvre la réalité. Le jeu consiste alors à organiser le rectangle» . Ses photos suscitent le questionnement, et si le cadrage parait parfois hasardeux - il joue énormément avec les symétries, les formes et les perspectives -, l’exposition consacre l’appareil photo comme miroir de la société, et celui qui le tient comme son témoin le plus subjectif. En agençant certaines photos ensemble, elles deviennent les pièces d’un puzzle, celui de la société.

Il y a derrière ces photos une déclaration d’amour qui est faite au Chili. A ses orphelins, à ses prostituées, à ses chiens errants. A force de photographier les vagabonds, Sergio Larraín en devient un, et parcourt de son regard la réalité du monde qui l’entoure. L’exposition devient une porte d’entrée dans le quotidien d’un artiste, enrichie de ses reportages, ses dessins, et ses citations.

Clément Ourgaud (www.lepetitjournal.com/Santiago) Vendredi 4 avril 2014
Rétrospective Sergio Larraín jusqu'au 15 juillet 2014, au Musée Bellas Artes de Santiago                                    

Parque Forestal de Santiago, (métro Bellas Artes), Ouvert de Mardi à Dimanche, de 10h00 à 18h50.