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jeudi 11 mars 2010

Chili: Sebastian Piñera investi président d'un pays à reconstruire

Symboliquement, c'est dans les décombres de Constitucion, ville du littoral ravagée par trois vagues géantes, que le chef de l'Etat effectuera son premier déplacement, quelques heures après son investiture à Valparaiso, siège du Parlement.
Piñera, qui succède à la socialiste Michelle Bachelet, ramène la droite au pouvoir pour la première fois depuis la fin de la dictature d'Augusto Pinochet en 1990, après 20 ans de gouvernements de centre-gauche. Une alternance largement saluée comme un signe de "maturité" politique du Chili.
Mais ce tournant a été complètement occulté par le séisme et la reconstruction qui s'annonce. Les travaux pourraient coûter au pays 3 points de croissance au premier semestre 2010, et 1 point sur toute l'année, selon des économistes.
"Mon gouvernement sera le gouvernement de la reconstruction", a reconnu le président élu le 17 janvier. Piñera a déjà annoncé une législation d'urgence "pour ajuster le budget 2010 (...) à la réalité et aux besoins" nés de la catastrophe, et des mesures d'austérité.
Le séisme --l'un des plus violents depuis un siècle avec une magnitude 8,8-- et le tsunami qui a suivi, ont fait 497 morts et au moins 260 disparus.
Dans les régions les plus touchées comme le Maule et le Bio Bio, l'ardoise s'élèverait à 1,2 milliard de dollars (880 millions d'euros) pour reconstruire au moins quarante ponts, à 3,6 milliards pour les hôpitaux.
Le coût des dégâts matériels, selon des sociétés américaines de modélisation des risques, pourrait dépasser les 15 milliards de dollars.
Pourtant, avant le séisme, Piñera semblait un président béni.
Il devait prendre les rênes du Chili au moment où l'économie de ce champion de la croissance en Amérique latine rebondissait après douze mois de récession, et alors que le pays venait d'adhérer au club d'Etats riches qu'est l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques).
Les prévisions donnaient une croissance de 4,5% en 2010, adossée au cuivre, dont le Chili est le premier producteur mondial.
Mais à présent, le nouveau chef de l'Etat est confronté à une reconstruction "qui prendra trois ou quatre ans", selon Mme Bachelet.
La catastrophe aura aussi vampirisé la fin de mandat de la première femme présidente du Chili, même si "la mère de tous les Chiliens" quitte le pouvoir avec une popularité record, 84%, grâce à son action sociale et ses mesures en faveur des femmes, de la famille, de la justice et des droits de l'Homme.
Michelle Bachelet n'a pas mentionné ses intentions politiques, mais sa popularité lui permet de garder un oeil sur la présidentielle de 2014, puisqu'elle n'a pas pu se présenter en 2010, la Constitution interdisant deux mandats présidentiels successifs.
Dans l'effort d'investissement à venir, Piñera, "le Berlusconi chilien" comme le surnomment ses détracteurs, sera surveillé de près par l'opposition qui redoute des conflits d'intérêts entre le pouvoir politique et le monde des affaires, dont le nouveau président est un emblème depuis 20 ans.
L'immense chantier est en revanche une opportunité pour lui de faire respecter sa promesse de créer un million d'emplois, et une occasion en or pour faire valoir son style de président-manager hyperactif, qu'il revendique haut et fort.